Je dois avouer que quand Marcus m'avait demandé de l'accompagner sur l'Exodus, seulement lui et moi, et personne d'autres, à bord d'une simple petite navette, j'avais été un peu sceptique. L'idée de laisser mon frère seul sur cette planète ne m'enchantait pas, et encore moins l'idée d'être si loin de lui au cas où les choses dérapaient. Mais maintenant que je suis plongé dans ce silence, avec à côté de moi, Marcus qui était concentré sur la conduite de la navette, chose que moi, je ne sais en aucun cas faire, je suis plutôt reconnaissant qu'Alek ne soit pas là. Parfois, la responsabilité que j'ai envers lui me pèse plus qu'autre chose, et d'être là, dans cette navette, dans un vide constant autour de moi, ça fait mal. ça me rappelle à quel point j'ai été égoïste, de le faire venir avec moi, de l'obliger à quitter ses parents pour se réveiller un beau jour en se disant qu'il ne les reverrait jamais puisqu'ils sont morts depuis bien longtemps. Cette révélation me fait mal à moi aussi, et je pense que d'être loin de lui me permet de l'évacuer un peu sans avoir peur de devoir lui montrer ma faiblesse. Et le fait que Marcus ne dise mot, sans doute ressassant lui aussi ses douleurs, ça m'aide.
Je me permet un coup d'oeil par le petit hublot, tombant dans la noirceur de l'espace, avant de voir finalement, la jolie boule verte au milieu de tout ça. Exodia est vraiment une très belle planète, faut le reconnaître, c'est pas donné à tout le monde de pouvoir voir ça un jour. C'est sans doute ce qui agit en tant que pansement sur mes blessures, sur le manque que je ressens au fond de moi. Mes parents, Jenna, et toutes les personnes que je connaissais... Autrefois.
Alors que mon regard est toujours plongé vers Exodia, je sens que la navette ralentit, avant de tourner ma tête vers le devant de l'appareil, et voir que nous arrivons au niveau du pont d'atterrissage. Marcus soupire une fois que celle ci est posée. Le voyage n'est pas très long, mais sans doute assez épuisant puisque nous sommes quand même dans l'espace. J'admire ce qu'il fait. Nous nous regardons tous les deux et il se met à sourire.
"Nous y voilà Johan. On prends le matériel dont on a besoin, puis si tu le veux on profitera du calme du vaisseau pour discuter ?"
Je sais très bien que parler va me faire mal, et va m'obliger à avouer qu'au fond, ça ne va pas, que je ne suis pas autant heureux d'être sur cette planète que j'aurai du l'être, et que le simple fait de devoir veiller sur mon frère avec tous ces dangers me fait peur. Mais je connais bien Marcus, je l'apprécie, et je sais que je ne suis sans doute pas le seul à avoir ce genre de sentiments cachés. Peut-être que ce serait pas plus mal de les partager. ça rendrait les choses moins... compliquées.
_ Ouais... Pourquoi pas.
Je lui sourris et finalement, commence à sortir de la navette direction l'Exodus.
"Whaouu quel enthousiasme. Johan, je comprends que vous soyez inquiet. Mais le champ de force est à présent monté et malgré les attaques continuelles des Dinosaures et des Natifs, il tient bon ! Les nôtres sont en sécurité. Croyez moi, on court plus de risques en étant sur ce vieux tas de ferraille que nos êtres chers sur Exodia."
Je reste un instant à le regarder, conscient d'avoir montré un peu trop ce à quoi je pensais. Et ce que je ressentais. Dans un sens ça fait du bien de pouvoir laisser un peu tout ça sortir, mais d'un autre, j'ai un peu peur de ce qu'il va penser de moi. Un soldat est censé être bien dans sa tête, fort, et ne doit pas flancher. Ce qui n'est pas forcément mon cas à ce moment là. Il ne faut pas que je me laisse submerger par mes émotions, alors qu'une responsabilité pèse sur mes épaules.
Je voulais répondre, lui dire qu'il avait sans doute raison, mais des pas nous surprennent et nous obligent à nous retourner. Mon regard se pose sur celui qui semble être le chef de Marcus, si je me souviens bien du nom, c'est le Capitaine Lorca. Je le salue poliment et militairement, et écoute les deux hommes parler sans broncher.
"Vice Chancelier, cela tombe vraiment bien que vous soyez là. Nous avons pas mal d'ennuis ici. Un de nos satellites est allé se perdre au milieu du champ de météorites. Nous n'avons ici personne d'assez qualifié pour le récupérer. Si cela ne vous gêne pas de nous rendre ce service, mes hommes prépareront tout ce dont vous avez besoin et à votre retour vous pourrez ainsi embarquer le tout et repartir de suite si vous le désirez."
J'essaie de comprendre un peu de quoi il s'agit, et j'ai l'impression que ce que je vais entendre ne va pas me plaire. C'est moi où ils veulent nous envoyer chercher leur putain de satellite? Dans une mer de météorites en plus? C'est une blague j'espère?
"J'accepte seulement si Johan m'accompagne. Je désire qu'il apprenne à se servir des navettes et je ne vois pas de meilleur exercice pour lui que de traverser un champ de météorites instable en plein espace !"
C'est encore pire que ce que je croyais... Moi qui comptait lui annoncer qu'il irait sans moi, je ne peux pas y échapper. Je dois avouer que je suis un peu chamboulé pour le coup, j'ai le choix entre aller avec lui et risquer ma peau, alors que je n'ai pas pu profiter de mon frère réellement depuis qu'on est arrivés, et renonce et sauver ma peau, au détriment de ceux qui sont dans l'Exodus...
"Alors quand dites vous ? Je vous embarque dans cette aventure Monsieur Mikaelson ?"
Je regarde le capitaine devant nous, qui semble attendre ma réponse, et finalement je me retourne de nouveau vers Marcus. Je lui dois bien ça, cet homme m'a permis de ramener Alek avec moi, je ne peux pas le décevoir. J'hoche la tête en guise de réponse, n'ayant pas forcément la force de parler. De toute façon, je ne sais pas quoi dire. Est ce que je vais vraiment devoir apprendre à conduire ces engins, et qui plus est dans un champ de météorites?
"Ne faite pas cette tête Johan, je suis sûr que nous allons bien nous éclater ! Si vous réussissez, je vous offrirais un verre du super whisky que je me réserve pour mon propre usage. Vous allez voir, cela n'a absolument rien avoir avec l'eau-de-vie bon marché que fait Wilson dans son bar !"
Il m'a légèrement tapé sur l'épaule, pour me réconforter, mais ça n'a pas forcément l'effet escompté. Je n'en reviens toujours pas d'avoir accepté, je suis vraiment un parfait idiot des fois. Je vais nous tuer....
_ Avec tout mon respect monsieur, si je ne nous précipite pas tout droit dans l'un de ces gros cailloux, il nous faudra plus que votre super whisky pour fêter ça.
Il se met à rire, surement nerveusement, et je reste à le regarder sans bouger. Cet homme est vraiment déroutant. Complètement flippant.
Il est vrai que j'ai pas droit au plus mauvais des professeurs pour le coup, et même si l'idée de devoir piloter un engin aussi gros ne m'enchante pas des masses, je dois reconnaitre que je suis soulagé de le savoir à mes côtés. Cet homme a fait beaucoup pour moi, et pour Alek et en général, je lui accorde toute ma confiance. Enfin, avant aujourd'hui, et son idée de me lacher un vaisseau entre les mains. Du coup, je suis un peu mitigé sur cette mission, ma peur de faire les choses mal, de décevoir les gens, et surtout, de ne jamais revoir Alek me prend aux tripes, ce qui a en général, pour effet de m'aider à ma concentration. Oui, pour mon frère il le faut. Je me concentre sur ce qu'il me dit alors que nous prenons place dans une autre navette et je regarde les boutons devant moi. Il y en a tellement, que je me demande comment je vais faire pour ne pas appuyer sur un bouton qui nous mènerait à la catastrophe.
"Tout d'abord allumer les moteurs. Pour cela appuyez sur le bouton vert à votre droite. Puis une fois le moteur allumer, vous détachez les pinces qui retiennent le vaisseau sur le pont. Voilà, vous voyez jusque là tout va bien non ?"
Le bouton vert.. Ok je le repère et je fais ce qu'il me dit, et après je suis censé faire quoi? J'espère qu'il va pas me laisser me démerder tout seul sinon ça va se montrer plutôt compliqué.
"A présent on met les gaz et on décolle ! En douceur s'il vous plait levez le manche légèrement vers le haut, puis c'est tout droit direction l'espace !"
Ah bah si....
_ Vers l'infini et au delà....
Je commence à lever légèrement le fameux manche, et je sens que la navette commence à bouger. C'est étrange car je le vois devant moi au niveau de la vitre du vaisseau, mais je ne sens rien, ce qui enlève un peu de mon stresse. L'espace est quelque chose de fascinant, et je ne pensais pas que j'allais autant m'y plaire. Même si je n'y passerai sans doute pas ma vie. La Terre c'est bien... Ouais. Et Exodia... Seul le temps nous le dira.
_ C'est plus facile que ça n'en a l'air.... Enfin, croisons les doigts pour la suite, je ne languis pas d'arriver dans la mer de cailloux...
Si on peut appeler ça des cailloux. Ces trucs font sans doute deux fois la taille du vaisseau, et j'aimerai pas en toucher un. Il va vraiment falloir que je me concentre. Au fur et à mesure des minutes, le silence me berce, accompagné de cette sensation de vide autour de moi, et j'ai l'impression d'oublier tout. Ce que je vois est magnifique, et jamais je ne l'aurai cru si on m'avait dit que je piloterai une navette spaciale un jour. Comme quoi... Je ne peux m'empêcher de regarder un peu partout, car tout ce que je vois me semble irréel dans un vide infini, et j’aperçois très vite quelque chose au loin. C'est plutôt clair dans cet océan noir, et ça ne m'inspire pas. Les météorites? Bordel, je dois faire quoi maintenant?
_ Monsieur, avant qu'on ne meurt vous voudriez pas reprendre le contrôle?
Je sais qu'il ne dira jamais oui, mais je peux essayer quand même..